Alexandre Trauner faisait des décors de cinéma. Il était aussi l’ami de Jacques Prévert depuis les années trente.
Il a conçu le décor (intérieur) de la maison d’Omonville, à l’image de celui de sa propre maison, située quelques centaines de mètres plus bas. Un aménagement tout simple, avec une grosse bête au milieu d’une pièce, un grand salon avec une longue table où des collages semblent encore aujourd’hui inachevés, une cuisine au sol de grès vert, et l’arrière de la maison qui s’enfonce sous le champ voisin.
C’est d’un même élan que les familles Prévert et Trauner quittent Saint-Paul-de-Vence pour Omonville, ayant succombé à la tranquillité (« ce drôle de patelin où il n’y a pas de bistrot », dit Prévert lors de sa première visite) et à la beauté de cette extrêmité de la presqu’île du Cotentin.
Janine et Jacques Prévert y emménagent en 1971. Ils apportent dans leurs bagages les souvenirs de vies bien remplies… Surréalisme, cinéma, poésie, avec, toujours, un double penchant : pour la défense des « petits », et pour la liberté.
« Embauché malgré moi dans l’usine à idées J’ai refusé de pointer Mobilisé de même dans l’armée des idées J’ai déserté ».
Choses et autres (1972).
Outre la maison d’Omonville, voici quelques lieux de vie de Jacques Prévert :
– 19 Rue de Chartres, à Neuilly-sur-Seine, où il naît le 4 février 1900.
– à Toulon, où les fragiles emplois de son père conduisent la famille en 1906.
– à Paris, où il s’établit à partir de 1922, d’abord dans une chambre de bonne passage Lathuile (18ème), puis au 54 rue du Château (14ème).
– Les années vingt et trente le voient, entre deux scénarios de films, aux côtés de Desnos, Aragon, Leiris, etc.
Il fréquente le 7 rue de l’Odéon, où se trouve la librairie d’Adrienne Monnier (en face de la librairie de Sylvia Beach, au 12), et croise peut-être Claudel, Gide, Joyce,…
– En 1940, Prévert se réfugie à Saint-Paul-de-Vence et à Tourette-sur-Loup. Il est un des scénaristes-dialoguistes les plus demandés du cinéma français mais refuse de travailler pour les producteurs officiels. Les Visiteurs du soir font un tabac en 1942, la censure n’y voyant que du feu. Pour travailler à d’autres projets, il séjourne à Paris début 1943. Il est alors domicilié à l’hôtel de Nice (disparu depuis), 4 bis rue des Beaux-Arts. Sa route croise souvent celle de Desnos et d’autres résistants, parfois celle de Sartre et de Beauvoir au café de Flore, et surtout, pour la première fois, celle de Janine.
– rue de l’Orme, à Antibes.
– L’appartement du 6 bis Cité Véron, à l’ombre du Moulin rouge à Paris, où il partage une terrasse avec son voisin du dessus Boris Vian, et dont le bureau a été reconstitué à Omonville.
Dans l’appartement de la Cité Véron ont lieu les réunions du pas très sérieux « Collège de Pataphysique ».
Prévert a eu d’autres adresses à Paris : avenue des Ternes, hôtel du Beaujolais rue de Beaujolais, rue Guynemer, avenue Junot en 1947…
Le 11 avril 1977, Jacques Prévert meurt d’un cancer du poumon. Il repose depuis, avec sa femme Janine et leur fille Michèle, dans le cimetière d’Omonville-la-Petite. Leur voisin est toujours Alexandre Trauner.
Autres demeures de l’auteur
Pour visiter le lieu
Maison Prévert, derrière l’église d’Omonville-la-petite (50440). Pour connaître les horaires d’ouverture : tel/fax : 02 33 52 72 38. Si vous avez le courage, filez aussi sur l’île de Tatihou (tel. : 02 33 23 19 92), à quelques dizaines de mètres de Saint-Vaast-la-Hougue. L’île a hébergé un centre disciplinaire pour enfants… indisciplinés. Prévert en a fait l’objet de l’un de ses poèmes.
À voir aux alentours
Quelques voisins écrivains :
– Boris Vian à Landemer,
– Alexis de Tocqueville à Tocqueville,
– Jules Barbey d’Aurevilly à Saint-Sauveur-le-Vicomte,
– Rémy de Gourmont à Coutances,
– Octave Feuillet à Saint-Lô,
– Didier Decoin quelque part dans la Hague…
– Erik Orsenna quelque part dans le Cotentin…
Petite bibliographie
Le dossier Prévert du Magazine Littéraire (juin 1997).
Présences littéraires en Basse-Normandie et dans les Iles anglo-normandes. Georges Poisson et Dominique Gros, Centre régional des Lettres de Basse-Normandie et Isoète Editions (Cherbourg), 1998.
Un drôle de patelin…, article d’Hélène Hervet. Hebdomadaire La vie, N°2757, 2 juillet 1998.
Jacques Prévert qui êtes aux cieux. Revue CinémAction (n°98, dirigé par Carole Aurouet). Editions Corlet-Télérama, 2001, 175 pages, 125 F.