Madame de Sévigné.
Walter Scott.
Entre des ancêtres qui tombent comme des mouches sur les champs de bataille ou les terrains de duels (son grand-père survit à dix-huit duels avant de mourir d’un accident de chasse) et une grand-mère qui deviendra sainte… en 1767, la marquise choisit une autre arme que l’épée ou la religion pour frayer son chemin : l’esprit, qu’elle manie avec art d’abord par la parole, puis, à partir de sa quarante-cinquième année, par la plume.
Avec elle, l’art épistolaire acquiert ses lettres… de noblesse et supplante l’art de la conversation dans lequel excellait jusqu’alors le XVIIe siècle.
La marquise voyageait avec ardeur, pourvu qu’au bout de la route il y ait un château :
– Marie de Rabutin-Chantal naît en 1626 dans l’hôtel de Coulanges, construit par son grand-père 1 bis place Royale (maintenant des Vosges). Son père décède rapidement, tué lors du siège de La Rochelle. Sa mère rejoint son mari en 1633.
– Après les mains du grand-père Coulanges, Marie vit à partir de 1637 des années heureuses au milieu d’oncles et de tantes, dans l’hôtel du 35/37 rue des Francs-Bourgeois, dont il reste peu de choses aujourd’hui. L’école est faite à la maison, et les enfants ont accès à de nombreuses oeuvres d’auteurs contemporains.
– Guidée par ses oncles, Marie épouse à dix-huit ans le beau Henri de Sévigné, propriétaire du château des Rochers. Ils deviennent marquise et marquis et s’installent 11 rue des Lions-Saint-Paul (la maison existe toujours).
– Françoise-Marguerite, future comtesse de Grignan bien appréciée de Louis XIV et principale destinatrice des fameuses Lettres, naît en 1647 et son frère Charles, en 1648.
Henri fait bientôt la cour à Ninon de Lanclos puis à Madame Gaudron (ce qui le conduira à la mort, en 1651, des suites d’un duel avec le chevalier d’Albret), et Roger de Bussy-Rabutin courtise la marquise, sans beaucoup de succès.
Même après la mort de son mari, Madame de Sévigné séjourne régulièrement aux Rochers – jusqu’en 1690. Elle s’est découvert un amour pour la campagne… et la vie bretonne est moins chère que la vie parisienne.
– Veuve, elle emménage rue Saint-Avoye (actuelle partie de la rue du Temple comprise entre la rue Michel-le-Comte et la rue Saint-Merri).
– Françoise épouse le comte de Grignan en 1669. Le jeune couple et la marquise s’installent 8 rue de Thorigny (l’hôtel a disparu depuis) mais, à l’automne 1669, le comte de Grignan est nommé lieutenant général du Languedoc.
– Madame de Sévigné écrit ses premières lettres à sa fille en 1671. Elle emménage chez ses cousins Coulanges 8 rue du Parc-Royal entre fin 1671 et mai 1672, la variole menaçant rue de Thorigny.
– Puis elle loue une maison existant encore 14 rue Elzévir (alors rue des Trois Pavillons) entre mai 1672 et 1677.
En 1672, elle séjourne au château de Grignan, mais l’ambiance deviendra électrique (elle y séjournera à nouveau en 1690 et en 1694-96). D’où, après quinze mois, retour de la marquise à Paris et échange de nombreuses autres lettres (environ 770 conservées aujourd’hui, qui ne seront éditées qu’après sa mort -alors que la marquise n’a jamais pensé à leur publication ; celles de la comtesse de Grignan ont malheureusement été détruites).
Par ses lettres, Madame de Sévigné essaie de reconquérir sa fille. Elle y parviendra, avec l’aide de la religion et des jansénistes, en expérimentant aussi que l’on aime parfois plus à distance que de près.
Les deux femmes s’écrivent deux fois par semaine lorsqu’elles sont éloignées.
Les Grignan font des séjours réguliers à Paris, et il arrive que des lettres soient adressées d’une chambre à l’autre quand la tension monte.
– En 1677, la marquise s’agrandit car elle accueille un oncle abbé et deux petites filles. Elle vient occuper le 8 rue de Montmorency (alors rue Courteauvilain -la maison n’existe plus). Mais le lieu est humide, et elle rejoint sa fille et le comte qui ont emménagé rue de la Couture Sainte-Catherine (devenue rue Sévigné), dans l’Hôtel Carnavalet.
– La marquise décède à Grignan le 17 avril 1696. Elle y repose sous une dalle de marbre blanc, dans l’église Saint-Sauveur.
Autres demeures de l’auteur
Madame de Sévigné séjourne également :
– au château de Montaleau à Sucy-en-Brie (2 rue Pierre Sémard, devenu le conservatoire de musique). Elle y passe plusieurs étés de son enfance jusqu’à son mariage en 1644,
– au château du Buron à Vigneux-de-Bretagne près de Nantes, appartenant à Henri de Sévigné. Elle y vient à huit reprises entre 1646 et 1689,
– au Château-Marie à Vitré,
– à l’Auberge du Cheval Blanc à Vichy, où elle vient soigner ses rhumatismes en 1676 et 77 (à l’emplacement actuel de l’hôtel du Pont-neuf, sur les bords de l’Allier),
– dans l’hôtel Jouffroy, rue Victor-Genoux à Luxeuil-les-Bains,
– au château de Bussy-le-Grand, ouvert toute l’année (03 80 96 00 03),
– au château d’Ancy-le-Franc, ouvert de fin mars au 11 novembre (03 86 75 15 63),
– au château d’Epoisses (Côte d’Or), ouvert d’avril à la Toussaint (03 80 96 42 65),
– au château de Cormatin, ouvert d’avril au 11 novembre (03 85 50 16 55),
– au château de Bourbilly,
– … et encore ailleurs…
Pour visiter le lieu
L’Hôtel Carnavalet (23, rue Sévigné, 75003 Paris, tél. 01 44 59 58 58 ; fax 01 44 59 58 10 61) est ouvert de 10h à 17h40, sauf les lundis et jours fériés. Gratuit sauf expositions temporaires. www.carnavalet.paris.fr
Le château des Rochers-Sévigné (route d’Argentré-du-Plessis 35500 Vitré, tél. 02 99 75 04 54) vaut le détour. Ne pas rater en particulier le « petit rediseur de mots jusqu’à l’oreille », système acoutisque étonnant, au centre de l’hémicycle de pierre dans les jardins du château.
Le château de Grignan, démoli en 1793, a été restauré entre 1912 et 1925. Pour tous renseignements sur les visites ou le Festival de la Correspondance : office de tourisme de Grignan : tél. 04 75 46 56 75 ou fax 04 75 46 55 89.
Petite bibliographie
Les écrivains du Marais. Promenade littéraire autour de la Place Royale. Le Promeneur des Lettres (tél : 01 40 50 30 95).
Madame de Sévigné à Grignan. Article de Paul-Émile Cadilhac dans Demeures inspirées et sites romanesques, tome I, Editions de l’Illustration. Paul-Émile Cadilhac et Robert Coiplet.
Le Val-de-Marne de Madame de Sévigné, article de Mireille Gérard dans Balade en Val-de-Marne sur les pas des écrivains, Éditions Alexandrines.