Si ce qu’écrit Stephen King dans Écriture, mémoires d’un métier est vrai, la relation qui unit son lecteur à un auteur est bien une relation de télépathie ; alors, pour lire La Maison des autres de Bernard Clavel, il s’agit de se mettre en condition.
D’abord se rendre à Dole, belle ville du Jura qui a vu naître Pasteur et grandir Marcel Aymé et Bernard Clavel. Plus précisément 11 rue Besançon. Se lever à quatre heures du matin. Tenter de saisir quelque part l’odeur du pain qui cuit. Fermer les yeux et s’imaginer être revenu au temps du Front populaire. Puis ouvrir La Maison des autres.
Ce livre (La Maison des autres, premier opus du cycle La Grande patience, dont les trois autres volets s’intitulent Celui qui voulait voir la mer, Le Coeur des vivants et Les Fruits de l’hiver, prix Goncourt 1968) est un roman d’apprentissage, celui du jeune Julien Dubois, de Lons-le-Saulnier, quatorze ans et demi, embauché en 1937 à la pâtisserie-confiserie Petiot, située alors 11 rue de Besançon presque en face d’une charcuterie. Clavel y fait revivre ses propres expériences, et dépeint avec autant d’attention et d’humour que Marcel Aymé (mais chacun a son style) la vie des petites gens de Dole et des alentours.
Si la rue de Besançon, centre du récit, reste aussi commerçante aujourd’hui qu’hier, certains noms de rues ont changé depuis les années 1930, mais on s’y retrouve plutôt bien.
La boucherie où les apprentis vont le vendredi matin chercher « la bidoche pour les pâtés » se trouve dans le roman au milieu de la Grande rue. La place de l’Ancienne-poste est sans doute celle qui se nomme aujourd’hui la place du 8 mai 1945…
D’autres rues et lieux de Dole sont mentionnés dans le roman : le buffet de la gare, où Julien effectue une de ses premières livraisons à vélo, la Bourse du Travail, où se déroulent les réunions de la CGT, l’avenue Rockefeller, le boulevard Wilson…