« Dès qu’on me regarde en face, mon coeur bat vite et je souris, je souris pour m’excuser, pour plaire, pour qu’on ne me renvoie pas, pour qu’on m’aime. »
Albert Cohen.
Avec Albert Cohen, les choses sont claires. Il crée des personnages pour séduire.
Séduire.
Sa mère, d’abord, prolongeant par son goût pour les histoires l’habitude qu’elle avait de lui laisser une lettre, chaque matin, sur la table du petit-déjeuner, avant de descendre tenir boutique.
Puis son copain Marcel (Pagnol), avec qui il partage les bancs du lycée Thiers de Marseille.
Les femmes, ensuite, Cohen aimant expliquer comment son oeuvre romanesque n’était, au début, que récits dictés à de « merveilleuses amies ».
Le monde entier, surtout, qu’il s’agit de rallier à la cause juive depuis qu’Albert, le 10 août 1905, le jour-même de ses dix ans, a été pris à partie par un camelot dans une rue de Marseille, devant une foule sinon complice, au moins immobile : « Toi, tu es un youpin, hein ?… Je vois ça à ta gueule… Tu viens manger le pain des français… Tu peux filer… Tu n’es pas chez toi ici… Va un peu voir à Jérusalem si j’y suis ! ».
La vie d’Albert Cohen est l’histoire d’une longue hésitation entre le sud et la Suisse :
– Albert naît donc le 16 août 1895, à Corfou où il vit cinq ans,
– sa famille vit ensuite rue des Minimes à Marseille, trois étages au-dessus du magasin familial,
– en 1914, Albert part à Genève étudier le droit,
– six ans plus tard, le voilà avocat à Alexandrie, depuis 1919 citoyen suisse marié à une protestante.
– 1921 : il s’installe villa Annie à Genève, chemin des Tulipiers. Cette année-là, il rencontre pour la première fois Chaïm Weizmann, responsable de l’Agence juive qu’il interroge pour sa Chronique d’Israël dans la Revue de Genève.
– en 1922, à la réception d’un texte, la NRF en la personne de Jacques Rivière propose à Cohen un contrat pour cinq livres à venir… et l’aide à trouver un poste au sein de la Division diplomatique du Bureau International du Travail. Ils le soutiennent également dans le lancement, début 1925, de sa Revue Juive qui ne vivra que six numéros.
– Lorsqu’il séjourne à Paris, c’est souvent à l’hôtel Lutétia. Il s’installe aussi un moment à Saint-Germain-en-Laye, 2 rue Descartes.
– en 1930, un congé « pour raisons littéraires » (!) lui est accordé par le BIT. C’est aussi le début du succès de Solal. Cohen navigue entre Neuilly-sur-Seine (9 rue Casimir Pinel) et le 101 bis rue du Cherche-midi, Genève, Saint-Jean d’Aulph en Haute-Savoie.
– l’exode de 1940 le pousse jusqu’au Foyer Suisse à Londres, 12 Bedford Way. Dans la précipitation du départ, il laisse derrière lui tous ses manuscrits en cours… mais pas sa chatte Timie. À Londres, il devient représentant officiel de Weizmann auprès du Général de Gaulle.
– quelques mois avant la naissance de l’Etat hébreu en mai 1948, Cohen est affecté à l’Office International des Réfugiés et s’installe, en juillet 47, rue du Léman à Genève.
– À partir de 1951, il se consacre entièrement à l’écriture et à ses personnages cocasses, excessifs et passionnés, qui ne demandent, comme leur créateur, que d’être aimés.
À voir aux alentours
Présences littéraires aux alentours :
– Baudelaire, qui a habité Neuilly,
– tout comme Théophile Gautier et Henry de Montherlant,
– Sartre, qui a enseigné au lycée Pasteur,
– Kessel, qui a vécu rue Quentin-Bauchart à Paris,
– Balzac (rue Raynouard),
– Maupassant, lorsqu’il vit rue du Boccador,
– Dickens et Zola, lorsqu’ils fréquentent les Champs-Elysées,
– Hugo, lorsqu’il meurt 124 avenue… Victor Hugo,
– et Paul Valéry… 40 rue Paul Valéry.
Petite bibliographie
Albert Cohen. Jean Blot, éditions Balland.
Albert Cohen dans son siècle, aux éditions Le Manuscrit (www.manuscrit.com).