L’hôtel des Saints-Pères, rue des Saints-Pères à Paris.
« Aucun fer ne peut transpercer et glacer le cur humain avec autant de force qu’un point placé au bon endroit. »
Raymond Carver, dans À propos de Where I’m calling from.
Admirateur de Tolstoï, Tchekov, de Sherwood Anderson et d’Hemingway, il contribue à la renaissance de la nouvelle américaine dans les années 80, en l’orientant vers une « fiction réaliste » -d’autres diront un « réalisme sale »- dans laquelle « la réalité se dévoile couche par couche » (Relations, préface de l’anthologie The best American short stories, 1986).
Ray naît en 1938 dans l’Oregon d’un père ouvrier de scierie que l’alcool et la pauvreté tuent à 53 ans.
À vingt ans, il a déjà une femme, deux enfants
et pas d’emploi stable.
En même temps que ses petits boulots, il suit des cours d’écriture à l’université à partir de 1958, d’abord au collège d’Etat de Chico avec l’écrivain John Gardner qui suit l’élaboration de ses premières nouvelles.
En effet, comme il doit vivre et ne peut se concentrer longtemps, explique Carver, il écrit court, des choses qui peuvent se placer à droite et à gauche : des nouvelles et des poèmes (c’est encore plus court), des poèmes qui ont souvent l’allure de petites histoires.
Alors que la « fiction postmoderne » règne en maître aux Etats-Unis dans les années 60 et 70, Carver réinvente une « fiction minimale » dont Tchekov a défini les principes : absence de discours politico-économico-social ; objectivité à tout prix dans les choses et les personnages ; brièveté du style ; sensibilité ; absence de clichés.
Sa première nouvelle paraît en 1963. En 1971, il commence à enseigner l’écriture, plus par nécessité que par plaisir car il n’est pas un grand bavard. Mais, quelques mois plus tard, l’alcoolisme l’empêche de continuer. Après son emploi, il perd sa maison et s’éloigne de sa femme. En 1976-77, il est hospitalisé à quatre reprises.
Le 2 juin 1977, il cesse de boire. C’est la plus grande fierté de sa vie. En novembre, il rencontre la poétesse Tess Gallagher.
En 1987, Tess et Ray visitent l’Angleterre, l’Écosse et l’Europe continentale : Paris (faisant étape à l’hôtel des Saints-Pères la nuit et, le jour, au café Bonaparte, aux Deux Magots ou chez Lipp), Wiesbaden, Zurich, Rome et Milan.
Celui qui se décrivait lui-même comme « une cigarette avec un corps attaché avec » meurt en 1988 d’un cancer du poumon.