Eugène Sue.
Des études peu brillantes, une adolescence « difficile » dans un écrin doré -son père est médecin en chef de la garde impériale-… Eugène est envoyé se calmer sur les océans, où il opère comme… chirurgien de la marine. Ces six années de mer, émaillées d’escales parisiennes qui lui permettent de s’initier à la peinture et, pour faire comme tout le monde, à la littérature, s’achèvent à la mort de son père en 1830 (décès qui le libère de toute contrainte). À son retour sur la terre ferme, il dévore Walter Scott, James Fenimore Cooper, Byron.
Il devient dandy-écrivain, côtoie Dumas, Balzac (qui sera son ami jusqu’à ce que les succès littéraires d’Eugène ne lui fassent de l’ombre), se lance dans les romans d’aventure et les romans mondains. Résultat : en quelques années, il dilapide l’héritage paternel et est ruiné.
Plus par recherche d’un succès littéraire que par conviction sociale ou politique, il écrit Les Mystères de Paris (publiés en feuilleton en 1842 et en librairie en 1844) en s’inspirant des Mystères de Londres. En fait, son projet initial est de captiver en décrivant une histoire fantastique qui se déroule dans les bas-fonds parisiens. Seulement, un journaliste (du journal La Phalange) loue le début du roman comme une critique incisive de la société, et Sue se prend au jeu…
Ces Mystères, comme d’autres romans-feuilletons de l’époque qui accompagnent la naissance des journaux à grand tirage, même dénigrés par la critique, rencontrent un succès immédiat. La réaction de ses lecteurs ouvriers, prolétaires, philanthropes, qui adressent à Sue témoignages, livres et brochures politiques, pousse l’écrivain à aller plus avant dans la défense des « petits ».
Les Mystères, ainsi que Le Juif errant et La Misère des enfants trouvés ne sont pas étrangers à la révolution de 1848. L’augmentation des salaires, l’égalité des femmes, la cogestion dans l’entreprise, le droit à l’éducation et à la culture, l’abolition de l’esclavage (Atar Gull) sont les thèmes romanesques d’Eugène Sue. Ponson du Terrail et Alexandre Dumas (Les Mohicans de Paris,…) prendront le relais de Sue en inquiétant moins, par leur contenu, le pouvoir impérial…
Autres demeures de l’auteur :
Voici quelques lieux de vie d’Eugène Sue, dans un Paris que bouleversera les aménagements du baron Haussmann, en Val d’Oise et en Sologne :
– Il naît en 1804 160 rue Neuve de Luxembourg, entre le boulevard de la Madeleine et la rue Saint-Honoré (aujourd’hui 21 rue Cambon).
– Ses parents acquièrent comme résidence secondaire le « château » de Bouqueval, près d’Ecouen, duquel il ne reste aujourd’hui que quelques pierres là où se trouve l’actuelle école de Bouqueval.
– Ils emménagent en 1810 dans un hôtel particulier situé 3 rue du Chemin du rempart, toujours dans le quartier de la Madeleine. La mère d’Eugène décède en 1820.
– Ses études médicales le mènent ensuite à l’hôpital de Cadix puis à l’hôpital militaire de Toulon.
– Pour commencer sa vie de dandy, Eugène s’installe en 1830 rue Vignon.
– Il se rend parfois chez sa soeur, dans son « château » de Saint-Brice-sous-Forêt.
– En 1837, ruiné, il se retire quelque temps en Sologne, dans le château de Souesmes, près de Salbris.
– Il revient à Paris en 1838, rue de la Pépinière, d’abord au n°81-83, puis au n°71, où il se fait construire un « ermitage » majestueux. Il serait situé aujourd’hui aux alentours du 41 (ou du 55, pour Alain Rustenholz, dans Paris ouvrier) rue La Boétie… s’il existait encore.
– En 1846, il s’installe au château des Bordes, près de Beaugency dans le Loiret. Il n’est pas pour autant absent de la capitale, puisqu’il déjeune un jour de cette année-là avec Dumas et Charles Dickens, qui habite alors 48 rue de Courcelles.
En 1849, il est élu député.
Il finira sa vie à Annecy-le-Vieux, et son corps repose au cimetière de Loverchy à Annecy, sous un orme pleureur.
Pour visiter le lieu
Le Château Dunois est visitable. Seul souvenir de l’écrivain, le « musée des Arts et traditions de l’Orléanais » présente la bibliothèque qu’Eugène Sue possédait au château des Bordes, imposant meuble Renaissance mais habité maintenant par d’autres livres que ceux qu’il lisait.
Le musée présente comme autre intérêt de faire revivre, scènes et costumes à l’appui, l’époque de l’écrivain.
Quelqu’un à contacter ?
L’Association des Amis du Roman Populaire (A.A.R.P.).
Petite bibliographie
Les Mystères de Paris : Eugène Sue et ses lecteurs. Jean-Pierre Galvan, Éditions L’Harmattan, 2 volumes de 432 pages.
Le feuilleton du socialisme. Article de Jean-Marc Barroso dans Le Monde du 5-6 août 1979, repris dans Le Monde, dossiers et documents n°23 (avril 1999).
Jean-Louis Bory, séduit par le personnage de Sue et la diversité de son oeuvre, lui a consacré deux ouvrages : Eugène Sue, dandy mais socialiste (Hachette Littérature, 1973, 450 pages) et Les plus belles pages d’Eugène Sue (Mercure de France).