Voici donc la chambre de la pauvre Marie Pezé, le pan mansardé et la fenêtre à tabatière, le seul lieu au monde en définitive, où le « petit ami » ait été vraiment aimé et heureux (Journal littéraire).
Par Bernard Vassor
« Mon enfance s’est passée toute entière dans ce quartier de Paris qui va de la Butte Montmartre aux grands boulevards, et qui est bordée, d’un côté, par la rue de Clichy et la Chaussée d’Antin, et de l’autre, par la rue Rochechouart et le faubourg Montmartre.
La région qui m’était la plus familière, celle où mes yeux s’emplissaient des images que je devais conserver toujours était celle qui est comprise entre les rues Notre-Dame-de-Lorette et Fontaine, les boulevards de Clichy et Rochechouart, et les rue Rochechouart et Lamartine. »
Ballotté entre un père comédien divorcé, sa mère Jeanne Forestier,, une «cocotte » qui l’a abandonné dès sa naissance, et la domestique de Léautaud père qui va vraiment l’élever.
Les rares rencontres avec sa mère se faisaient dans des « maisons meublées », la plus mémorable fut cette entrevue, passage Laferrière en 1881 : « dans une maison qui existe encore je crois[[Ecrit en 1902]], le passage Laferrière est devenu depuis la rue Laferrière et les deux grilles qui fermaient à ses deux extrémités, rue Notre-Dame-de-Lorette et rue Bréda[[La rue Bréda est aujourd’hui la rue Henri Monnier.]], ont disparu »
Celle qui lui servira de mère, Marie Pezé habitait au 14 rue Clauzel, et c’est là que le petit Paul a passé la plupart du temps sa petite enfance.
« Ma chère maman Pezé, je revois parfaitement la petite chambre mansardée que Marie occupait au sixième étage et que nous regagnions chaque soir vers les neuf heures et demie. Je voulais toujours qu’elle me porta pour monter l’escalier. Arrivée au cinquième, elle prenait un petit couloir obscur, qui jusqu’à un escalier tournant d’une dizaine de marches au plus qui menait au sixième étage. La porte de la chambre était juste en face. Comme j’y étais bien dans cette chambre, et quelles heures tranquiles j’y ai vécues, bien plus heureux que dans les appartements paternels ! »
Le domicile du père était au 21 rue des Martyrs.
Je ne sais pas en quelle année, Marie Pezé est sortie de la vie du « Petit ami », mais, dans une lettre à sa tante Fanny Forestier du 31 décembre 1882, P.L. après le déménagement à Courbevoie, lui écrira :
« Ma Chère tante[[Dans les lettres à sa mère, il l’appelait Madame…]],
(…) je vous demanderai de m’envoyer le nom et l’adresse de ma mère. Mon père vous souhaite une bonne année et une bonne santé ainsi que moi, Madame Pezé vous souhaite bien le bonjour.
Je vous embrasse de tout mon cur.
Paul Léautaud
3 avenue de la République
Courbevoie
Seine. »
Dans le volume de la « Correspondance », il ne sera plus question de Marie Pezé, qu’est-elle devenue ?
D’autre part, Léautaud semble ignorer que le père Tanguy, depuis l’année de naissance du Paul, tenait la boutique du 14 rue Clauzel, et que Vincent Van Gogh était un habitué de cette maison jusqu’en 1889…
(Emile Bernard avait dans un long article au « Mercure de France », mentionné le 14 rue Clauzel).
L’immeuble était alors fréquenté par des «insoumises », des fenestrières comme on disait à l’époque.
Quelques ouvrages de Paul Léautaud :
Le Journal Littéraire, 17 volumes je crois, à quand une réédition ?
Le Petit ami, Mercure de France 1903
Paul Léautaud Correspondance 1, 10/18 domaine français © 1972
Archives personnelles
Archives de la Préfecture de police
Pour l’histoire des fenestrières consulter le site de Noëlle Benhamou, la spécialiste de Maupassant ( qui a vécu au 19 rue Clauzel presque en face du 14),
http://perso.wanadoo.fr/maupassantiana.