Le Café de La Régence

Je dois à mon ami Philippe Godoy[[Philippe Godoy est universitaire, professeur de littérature comparée, historien des premiers et deuxièmes arrondissements.
Vient de paraître : Alain Goudot et Philippe Godoy, Carnet de Paris 1er & 2e arrondissements, Le cœur Historique Equinoxe septembre 2005.]], d’avoir réussi à situer avec précision le lieu de cet établissement.
Ce café était à l’emplacement de l’ancienne porte Saint-honoré, où Jeanne d’Arc voulant reprendre Paris aux Anglais, le 8 septembre 1429, eut la cuisse transpercée d’une flèche, alors qu’elle sondait le fossé rempli d’eau pour le faire combler avec des fagots, comme l’indique l’inscription dans un macaron située au dessus de la porte de l’immeuble


Les premiers statuts des limonadiers datent du 28 janvier 1676 et furent soumis à des réglements de police assez sévères.

161 Rue Saint Honoré.
161 Rue Saint Honoré.

Le Café de la Régence s’appela d’abord le Café de la place du Palais Royal et ne prit son autre nom qu’après 1715 évidemment. Le premier propriétaire se nommait Lefèvre, auquel succéda un certain Leclerc.

Diderot nous apprend dans Le Neveu de Rameau que Leclerc avait cédé la place à un sieur Rey.

« Qu’il fasse beau, c’est mon habitude d’aller vers les cinq heures du soir me promener au Palais Royal. C’est moi qu’on voit toujours seul, rêvant sur le banc d’Argenson.
Je m’entretiens avec moi-même de politique, d’amour de goût ou de philosophie.

Si le temps est froid ou pluvieux, je me réfugie au café de la Régence, là je m’amuse à voire jouer aux échecs. Paris est l’endroit du monde et le café de la Régence est l’endroit de Paris où l’on joue le mieux à ce jeu ; c’est chez Rey que font assaut le Legal profond, Philidor le subtil, le solide Mayot… ».

Chamfort.
Chamfort.

Rey, était un ancien cuisinier du Duc d’Orléans, il tenait encore le café de la Régence en 1777. Nous pouvons lire dans l’Almanach Royal[[L’Almanach Royal portait pendant la régence le nom « d’ALMANACH DAUPHIN« .]] de cette année là :
« Son établissement est un des plus anciens et des plus renommés, très bien composé et suivi des plus habiles joueurs d’échecs ».

Parmi sa clientèle, se croisaient Chamfort, Rousseau, Marmontel, Grimm, Lesage, et Benjamin Franklin.

Rousseau.
Rousseau.

Lisez la description de Lesage dans La Valise retrouvée :
« Dans une vaste salle ornée de lustres et de glaces, une vingtaine de graves personnages, qui jouent aux dames ou aux échecs sur des tables de marbre, et qui sont entourés de spectateurs attentifs à les voire jouer. Les uns et les autres gardent un si profond silence que l’on n’entend dans la salle que le bruit des pièces que les joueurs déplacent. »

Jean-Jacques Rousseau de retour à Paris se montra plusieurs fois dans ce café. Sa présence y attira une telle foule que la police finit par lui défendre de se montrer en public.

Musset.
Musset.

Hélas, les choses se sont bientôt gâtées. L’élargissement de la place du Palais Royal et la proximité de l’Opéra y attirèrent des musiciens et leur cortège d’amateurs, s’opposant d’école à école dans des disputes passionnées. Les entractes du théâtre Français, vidaient les baignoires pour remplir les lavabos… Les auteurs et les journalistes se rejoignaient là, et il n’était pas rare de coudoyer Alfred de Musset buvant de l’absinthe, ou bien Sainte Beuve dégustant un chocolat chaud.

Bernard Vassor, auteur du blog http://bernardvassor.canalblog.com.

4 Comments

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  1. 1
    jean-francois briend

    > Le Café de La Régence
    Bonjour et merci pour votre site qui m’a particulièrement intéressé.

    Pour des raisons généalogiques, je suis à la recherche du nom du propriétaire du café de la Régence en 1793.

    Le café de la Régence portait-il toujours ce nom à cette date ?
    Etait-il toujours dans l’enceinte du Palais Royal à cette même date ?

    Si vous avez des réponses à ces interrogations je vous remercie de bien vouloir me les communiquer

    • 2
      Philippe BOISSEAU

      > Le Café de La Régence
      Il y a bien eu deux cafés de la Régence dans le quartier du Palais Royal.
      Le premier fut fondé en 1681, à l’angle occidental que faisait l’ancienne place, beaucoup plus petite que l’actuelle, avec la rue St Honoré.

      C’est vers 1715, c’est-à-dire sous la Régence, qu’il devint le quartier général des joueurs d’échecs parisiens. Voltaire, Rousseau, Diderot — qui en parle dans son Neveu de Rameau — en étaient des habitués.

      C’est dans ses murs que furent mis au point les détails de l’édition de l’Encyclopédie avec les imprimeurs Lebreton et Briasson, en 1750.

      C’est à sa terrasse que s’installa Jacques-Louis David pour croquer les portraits de Danton et de Marie-Antoinette emmenés vers l’échafaud.

      Il fut, en 1815, le théâtre de nombreux duels entre officiers bonapartistes et royalistes.

      C’est enfin dans cet établissement que se retrouvèrent Karl Marx et Friedrich Engels, lorsqu’ils vinrent à Paris, en 1844, rencontrer la gauche française avec le projet de lancer une revue : les Annales franco-allemandes. Ils se connaissaient alors à peine, puisqu’ils ne s’étaient rencontré qu’une seule fois auparavant, à Cologne.

      Dix ans plus tard, en 1854, le café de la Régence déménageait, pour cause de travaux Haussmanniens, à son adresse plus connue du 161 rue St Honoré, restant quelques temps le rendez-vous des maîtres des échecs.

      Ce second établissement a fermé en 1920.

  2. 3
    Bernard Vassor

    > Le Café de La Régence
    Cher Monsieur,
    vous trouverez dans « Le Petit Atlas Pittoresque des 48 qurtiers de la ville de Paris par A-M. Perrot A Paris chez Carnot libraire…. 1835 » à la bibliothèque Historique de la Ville de Paris rue Pavée 75003.
    L’emplacement d’un café sur la place du Palais Royal en 1793.
    J’espère pouvoir vous en dire davantage lors de mes prochaines recherches aux archives.

    • 4
      valentin phijffer

      > Le Café de La Régence
      Dear Sir,

      Last year i was in de Bibliothique Historique and i found a little book written by , i thought Ettiene Bazot, who described a lot of café’s as so
      Cafe de la Regence. He was not so enthousiast as i suspected.
      Only a few pages were written avout this cafe.
      I have got some translations written there,
      the book is called
      « Les Cafe de Paris »
      By a tax paying citizen
      de Ettiene Bazot ( around 1799 ?)

      Valentin

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