Stendhal, grand voyageur qui aima passionnément l’Italie, était attiré, non pas tant par la ville de Lyon que par sa gastronomie déjà très renommée à son époque.
Dans son livre de souvenirs intitulé » Mémoires d’un touriste » publié en 1838, Stendhal évoque en termes élogieux la gastronomie lyonnaise dont il dit : « Je ne connais qu’une chose que l’on fasse très bien à Lyon ; on y mange admirablement, et selon moi, mieux qu’à Paris. » Il narre sa rencontre avec un groupe de bons esprits et de bons vivants pour qui dîner est affaire sérieuse.
Chaque membre du groupe invite à son tour chez lui ses amis, avec un seul impératif : régaler des convives très exigeants qui jugent la prestation en amateurs avertis et sourcilleux de la qualité, leur offrir un fastueux repas digne des plus grandes tables et des palais les plus raffinés. Rien ne devait être laissé au hasard : « Un tel dîner, écrit Stendhal, où tout doit être parfait, n’est pas une petite affaire pour celui qui le donne, il faut être en course dès l’avant-veille. » Une occupation à temps plein, pas à la portée du premier venu. Mais qu’importe, Stendhal ne boude pas son admiration devant cette recherche de l’excellence.
« Après dîner, écrit Stendhal, on allait jouer aux boules aux Brotteaux[[Les Brotteaux : quartier de Lyon autour de l’ancienne gare des Brotteaux construire entre 1904 et 1908, classée monument historique, constituant le VI ème arrondissement.]]: nous longions le quai Saint-Clair. »[[Quai Saint-Clair : ancien nom du quai situé sur la rive droite du Rhône, sur les communes de Lyon et de Caluire.]] Un jour sur les bords du Rhône, indiquant un petit hôtel, l’un des participants s’exclama : « Ah ! C’est la maison de la pauvre madame Girer de Loche. » Et il se mit à raconter l’histoire de cette jeune veuve, riche, jolie et fort aimable.
Pieuse et chaste depuis la mort de son mari, « résistant depuis six ans à tous les hommages », elle n’en tomba pas moins amoureuse d’un jeune Grenoblois qui vint s’établir dans l’immeuble de madame Girer, juste au-dessus de chez elle. Coïncidence bien troublante qui n’effleura personne dans le quartier, ceci d’autant plus que le jeune homme repartait parfois à Grenoble pour ses affaires, « prit le goût de la pêche, et pêchait souvent dans le Rhône sous les fenêtres de la maison qu’il habitait. » Ils firent construire un escalier intérieur qui leur permettait de se voir en toute discrétion. Personne ne pensait à mal dans ce quartier tranquille, surtout d’une jeune veuve aimable et respectable.
Mais au bout de six années, le jeune volage convola en justes noces chez lui à Grenoble. Le coup fut si rude pour la dame que sa santé en pâtit fort et qu’elle alla s’établir dans le midi, à La Ciotat. Mais tous ses efforts furent inutiles et on la découvrit quelques temps après asphyxiée dans sa chambre.
On découvrit « qu’elle avait brûlé son passeport et démarqué son linge ».
Triste fin qui ne suffit pas à altérer durablement la bonne humeur des membres de l’équipe.
Christian Broussas, Feyzin le vendredi 15/10/ 2010
Autres fiches à consulter sur ce site :
– » Antoine de Saint-Exupéry à Lyon, Paris… » ;
– » Jean-Jacques Rousseau à Lyon » ;
– » Pétrus Borel à Lyon, Paris… » ;
– » Albert Camus au Panelier (haute Loire) et à Lyon en 1943″ ;
– » Bernard Clavel à Château-Chalon « (près de Lons-le-Saunier) ;
– » Roger Vailland aux Allymes dans le Bugey (Ain) » ;
– » Bernard Clavel à Courmangoux dans l’Ain » .
Références bibliographiques, œuvres à caractère autobiographique :
– » Mémoires d’un touriste (1838) »,
– » Journal de Stendhal (1801-1823) »,
– » De l’amour (1822) »,
– » La vie de Henri Brulard (1835) »,
– » Correspondance de Stendhal (1855) ».