« J’en veux à Montherlant d’avoir été si inférieur à sa propre grandeur. »
Marguerite Yourcenar. Lettre à Jeanne Carayon, 8 avril 1976.
« La grande coupable, c’est la vie en société. »
Montherlant, dans La Dépêche de Constantine, 18 décembre 1936.
Par « vie en société », Montherlant entend vie de couple, société de consommation, conventions sociales, Etat politique.
Pour s’en échapper, il trouve refuge chez les Anciens… et côtoie les jeunes garçons.
Né et mort à Paris (ou Neuilly, c’est tout comme), il est, entre les deux, grand voyageur, écrivant et décrivant toujours, parfois assis dans la rue ou sur le banc d’un parc.
Ses principales escales en France sont les suivantes :
– Montherlant partage avec Marguerite Yourcenar le triste privilège d’avoir tué sa mère en naissant. Mais si Madame de Crayencour décède quelques heures après la naissance de sa fille, Madame de Montherlant, abimée à vie par une hémorragie utérine provoquée par l’accouchement, survit vingt ans à celle de son fils, qui naît donc le 20 avril 1895, 11 bis avenue de Villars à Paris (là-même où naît Louis Aragon deux ans plus tard).
Malgré sa faible santé, elle est plus présente aux côtés d’Henry qu’un père qui est là sans être là, et elle lui fait découvrir la lecture.
C’est ainsi qu’en 1904, il découvre Quo Vadis, qui lui révèle la « sauvagerie » qui est en lui et lui donne l’envie d’écrire.
– De 1907 à 1925, son adresse fixe est le 1 Passage Saint-Ferdinand à Neuilly (entrée par le 175 avenue Charles-de-Gaulle).
En 1907, il est écolier à Saint-Pierre de Neuilly. Il lui arrive de prendre la défense d’Aragon dans la cour de récréation.
Il intègre le collège Sainte-Croix en 1911, d’où il est renvoyé l’année suivante car son système de parrainage des plus jeunes par les aînés n’est pas du goût de tout le monde.
– Entre 1914 et 1916, il est agent d’assurance chez son oncle, rue de Richelieu. Il est mobilisé quelques jours en 1918, et surtout fier de pouvoir dire qu’il l’a été, et de revenir avec une blessure.
– Grâce à Mauriac, une revue reprend en 1919 sa première oeuvre, La Relève du matin, qu’il fait publier un an plus tard à compte d’auteur. Cela lui attire l’attention d’autres écrivains catholiques (Bordeaux, Régnier,…), de Claudel et de Rivière.
Son premier roman, Le songe, est lancé par Grasset en 1922 et lui assure un début de renommée.
– En 1925, il entame une période de dix années de voyages en Espagne et en méditerranée. Il est fasciné par la corrida.
– Entre 1928 et 1939, il campe – plus qu’il n’habite – dans un appartement rue de Bourgogne, sans déballer ses cartons.
À quarante ans, il est parvenu à dompter son sommeil (pour lui, dormir, c’est perdre du temps sur la vie ou sur l’écriture).
– En 1933, en recherche de belles racines, il visite le château de Montherlant dans l’Oise, où ont vécu ses ancêtres.
– L’été 1940 le trouve hôtel de la Faculté, 36 allée Léon Gambetta à Marseille. Le mois d’août le voit à Tulle, hôtel Saint-Martin, quai Aristide-Briand et la fin de l’année à Nice, à l’hôtel de Berne.
– Entretemps, il a emménagé en septembre 1940 à l’entresol du 25 quai Voltaire – dans l’immeuble-même où vécut Musset et à côté du 27, où est décédé Voltaire.
Il vit là jusqu’à son suicide en 1972, se replongeant de plus en plus dans la lecture de ses Anciens : Plutarque, Cicéron, Lucain, César.
– En février 1942, il séjourne brièvement hôtel Taranne, au-dessus de la brasserie Lipp, face à Saint-Germain-des-Prés.