La grande comédienne française (1844-1923), qui a largement contribué à diffuser sa légende, possédait de réels dons de sculptrice, et de peintre ; en outre elle a publié ses mémoires, des romans, quelques pièces de théâtre, et un pamphlet en réponse à l’attaque d’une ancienne camarade. Bref une artiste complète.
Sarah est née le 22 octobre 1844 à Paris, chez une sage-femme qui habitait 5 place de l’École-de-médecine (6e arrondissement) et non le 22 septembre au 5 rue de l’École-de-médecine, comme l’indique par erreur la plaque (immeuble disparu, qui se trouvait un peu plus loin vers l’ouest).
Sa mère, Judith Bernardt, qui arrivait des Pays-Bas après une étape au Havre, demeurait alors rue de la Michodière. Comme tant de petits Parisiens, Sarah est placée chez une nourrice, d’abord en Bretagne puis à Neuilly. Celle-ci s’installe ensuite au 65 rue de Provence. Dans ses mémoires Sarah prétend s’être jetée par la fenêtre pour protester contre l’abandon par sa mère…
Sa famille l’envoie ensuite dans une pension tenue par madame Fressard à Auteuil, 18 rue Boileau (immeuble disparu).
S’il ne l’a pas reconnue, son père, un notable du Havre, paie ses études chez des religieuses de Versailles. Elle y reçoit le baptême en 1856. Le couvent du Grandchamp abrite aujourd’hui l’évêché de Versailles.
Sarah retrouve un temps sa mère, une demi-mondaine qui tient salon, au 265 rue Saint-Honoré, où l’on reçoit des personnalités comme le duc de Morny et Alexandre Dumas père (immeuble disparu).
Reçue au Conservatoire, puis à la Comédie-Française grâce à l’appui de Morny, ses débuts sont difficiles. Dans ses mémoires elle évoque sa vie rue Duphot. Effectivement l’acte de reconnaissance par sa mère daté de 1863 leur donne comme adresse le 15 rue Duphot.
On la retrouve 11 boulevard Malesherbes, où naît son fils adoré Maurice le 22 décembre 1864, fruit d’une liaison passagère avec un prince belge.
En 1867, Sarah emménage 16 rue Auber à proximité du chantier de l’Opéra. Mais n’y reste que peu de temps en raison d’un incendie qui ravage l’appartement. Elle prend ensuite un meublé 4 rue de l’Arcade dans une maison qu’elle trouve triste et abandonne rapidement.
En 1870, elle intègre l’appartement neuf que sa sœur Jeanne avait loué au 4 rue de Rome, à l’entresol. Le propriétaire, l’architecte Jules Bon, venait de le construire. Elle y recueille sa sœur Régina qui y meurt. C’est à cette époque qu’elle prend l’habitude de se faire photographier dans son cercueil.
Après ses déconvenues à la Comédie-Française, Sarah envisage de se tourner vers la sculpture, art dans lequel elle excelle. Elle loue un atelier d’artiste, au rez-de-chaussée de l’immeuble sur cour, au 11 boulevard de Clichy vers 1873 (porte codée).
Enfin elle peut se faire construire par l’architecte Escalier un véritable hôtel particulier de style Louis XIII, dans le nouveau quartier à la mode, la Plaine Monceau, à l’angle de la rue Fortuny et de l’avenue de Villiers. Il n’en reste malheureusement rien, sauf quelques pierres de l’atelier de sculpture construit dans la cour. En 1885, ruinée, Sarah doit se résoudre à vendre l’hôtel à la veuve Dervillé qui s’y installe avec sa fille et son fils Stéphane, futur directeur-adjoint de l’exposition universelle de 1900. Ce sont eux qui édifient l’hôtel néo-gothique et Renaissance sur l’emplacement et avec les pierres de l’atelier. L’hôtel de la comédienne et le pastiche néo-gothique sont démolis dans les années 1950 pour faire place à un immeuble de bureaux.
Sarah s’installe alors provisoirement dans un bel hôtel particulier au 15 de la rue Saint-Georges, construit par l’architecte Bélanger pour une danseuse au 18e siècle. Cet immeuble est connu pour avoir ensuite abrité le journal L’Illustration.
Après sa deuxième tournée internationale en Amérique en 1887, l’actrice retrouve le quartier de la Plaine Monceau, au 56 boulevard Pereire, dans un hôtel qu’elle loue au directeur de théâtre Cantin (immeuble démoli). Elle y habite jusqu’à sa mort en mars 1923 lors du tournage d’un film muet.
Sarah avait le goût de son époque poussé à l’extrême. Comme dans les domiciles précédents, elle y avait entassé un bric-à-brac invraisemblable d’objets hétéroclites et y entretenait une ménagerie d’animaux domestiques et exotiques. Ils furent dispersés lors de ventes aux enchères afin de payer ses dettes. Un plafond peint par son ami Georges Clairin est acheté et remonté dans le restaurant L’Escargot. On peut encore l’admirer dans le vestibule au 38 de la rue Montorgueil.
Son superbe portrait par Clairin constitue aujourd’hui un des joyaux du Musée du Petit-Palais.
En 1898, Sarah avait pris la direction du Théâtre lyrique de la place du Châtelet, qui deviendra le Théâtre Sarah-Bernhardt après une série de travaux. Sous l’Occupation, on retire le nom de la comédienne à cause de ses origines juives. Le nom revient en 1947 pour disparaitre à nouveau quelques années plus tard. La réouverture après travaux est prévue fin 2023. La salle reprendra le nom de Théâtre de la Ville – Sarah Bernhardt (place du Châtelet).
Sarah y avait fait aménager une loge composée de plusieurs pièces. On en découvre quelques vestiges dans le foyer de l’actuel théâtre. Aujourd’hui, un restaurant au rez-de-chaussée de l’établissement rend hommage à la comédienne avec de nombreuses reproductions.
Sarah Bernhardt repose au cimetière du Père-Lachaise, auprès de sa mère, de ses sœurs et de son fils, dans un monument très simple (division 44).
Après sa mort, ses amis et ses admirateurs se cotisent pour lui offrir une statue, inaugurée en juin 1926, place Malesherbes (l’actuelle place du Général-Catroux), non loin de son hôtel. Elle représente Sarah dans le rôle de Phèdre, « drapée dans un ample voile et assise dans une attitude pensive ». C’est le seul souvenir de l’actrice dans le 17e arrondissement où elle a vécu la plus grande partie d’une existence bien remplie.
Sources :
The Strand Magazine (journal anglophone, qui a publié les mémoires de Sarah en anglais, avant la version française) n°27-28-29, avril 1904 à mars 1905 (en ligne).
Sarah Bernhardt, Ma double vie, Paris 1907.
Noëlle Guilbert, Chez Sarah Bernhardt, dans les théâtres parisiens. 2002.
D. Prévost, H.-C. Richard, Sarah Bernhardt chez elle à Paris, Société historique des 8e et 17e arrondissements, Cahier n° 151, mai 2021 et Le père de Sarah Bernhardt, une énigme enfin résolue, Cahier n° 161, septembre 2022 (en ligne).
Hélène Richard
Société historique des 8e et 17e arrondissements de Paris